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      SCOLCA MEMORIA

      Haute Corse - Canton Golo Morosaglia

       

      Histoires, Anecdotes et autres Chroniques

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        Vistighe di a sucietà sculcaraccia à l’età muderna

         (cinquecentu è seicentu)

        Syvain Gregori : Vistighe di a sucetà sculcaraccia à l’età muderna ((cinquecentu è seicentu) 

         

        Dans sa Chronique de la Corse rédigée dans les années 1590, Anton Pietro Filippini donne la liste des villages abandonnés par leurs habitants suite aux raids barbaresques. Parmi ces communautés disparues figure celle de Serra, située près de Borgu, et dont les ruines sont encore visibles de nos jours. Ce sont ses habitants qui fonderont le village de Scolca. La mémoire collective locale a conservé le souvenir des origines de cette fuite à travers la légende d’une invasion de fourmis qui aurait poussé la population à quitter Serra pour s’établir à Scolca.

         

        En 1537, au cœur de la pieve de Bigornu dépendant de l’évêché de Mariana, les villages d’Erbaghju et de Scolca comptent respectivement 24 et 17 feux (soit environ 150 et 110 individus). Seul Lentu dépasse alors la centaine de feux, soit plus de 650 villageois. Dans son Dialogo nominato Corsica, l’évêque génois Monseigneur Giustiniani (1470-1536) évoque en quelques mots l’économie de la pieve à cette période : « produce biade, bestiami e qualche puoche castagne. » Plus d’un siècle plus tard, en 1646, la population du village n’a augmenté ; 18 feux pour Scolca et 18 feux pour Erbaghju, soit 250 habitants. A cette date les notables – les principali – du village sont au nombre de 6 : Antonio Maria q. Alessandro, Antonio Martino di Fabiano, maestro Martino, Gio. Martino, Gio. Francesco et Liberato. Démontrant l’intégration de l’intérieur de l’île au système économique ligure, le procoio  du Golu, exploitation agricole d’un noble génois, est géré par des fattori, équivalent d’intendants, qui sont très majoritairement originaires du village ou de ceux des communautés voisines.

         

        La visite apostolique de Monseigneur Marliani, évêque de Mariana et d’Accia, le 9 octobre 1646 donne la description suivante de l’intérieur de l’église du village de cette communauté :

         

        « La chiesa ha l’altar maggiore col tabernaclo, ed una icona con l’immagine della Madonna, S. Pietro, S. Paolo, S. mamiliano, e S. Simone annesso che ora resta trasferita in una capella a cornu evangelii nell’istessa chiesa, ed il venerdi santo, com’anco le Rogazioni si va in processione sino al detto luogo di S. Simone, c’hè chiesa dirutta. »

         

        La société sculcaraccia à l’époque moderne

         

        Quelques actes du Civile Governatore donnent des indications sur la population du village de Scolca aux XVIe et au XVIIe siècles. A cette période, les patronymes sont loin d’être généralisés dans la société insulaire, aussi désigne-t-on les individus par leur prénom de baptême suivi du prénom de leur père précédé de l’abréviation « q. » signifiant « fils de ». De même, trouve-t-on parfois la mention du village d’origine suivant le prénom. Ces deux types d’information permettent d’établir des filiations, parfois sur plusieurs générations puisque, à cette époque déjà, le petit fils prend généralement le prénom de son grand-père.

         

        En 1555, un notaire officie à Scolca, il s’agit d’Anton de la Scolca. Sa présence dans ce village ne doit pas faire oublier que son activité professionnelle devait nécessairement s’étendre à toute la pieve. Les Corses de l’époque moderne ont en effet souvent recours aux services d’un notaire, du moins pour les plus aisés d’entre-eux. Par l’écrit, le notaire fixe aussi bien les titres de propriété, les dots, les successions, ou encore les contrats de travaux entre un artisan et ses clients… Dans cette société encore fondée sur l’oralité, le but est d’éviter tout contentieux entre individus. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les inimitiés entre individus et familles ne se règlent donc pas systématiquement par la violence, même si en 1499, le gouverneur génois prononce le bannissement de Giovan Paolo de la Scolca pour homicide sur la personne de Ristoro de la pieve de Bigornu. 

         

        Plus fréquemment, les conflits privés tournent au procès. Scolca n’échappe pas à cette pratique généralisée dans toute la Corse à l’époque moderne. Dans une économie rurale et agricole, ces discordes sont le plus souvent en relation avec l’exploitation du terroir, de cheptel ou avec la notion de propriété. Citons quelques exemples. En 1587, Ferigniaccio de Scolca tue un bœuf appartenant à Polidoro Negrone sous prétexte que le droit lui donne l’autorisation de tuer tout animal faisant des dégâts sur ses terres ensemencées et clôturées. La même année, Rossignolo de Scolca et ses fils empêchent par la force Antonio q. Agostino de Catarello de cultiver une de ses propriétés. En 1589, Agostino de Scolca intente un procès à Giacomorso de Canavaggia au sujet de la propriété d’un terrain. En 1597, le seigneur Bartolomeo Invrea accuse Giosettino et d’autres habitants de Scolca d’avoir commis des dégâts sur ses terres. En 1602, Giacometto de Scolca traîne devant les tribunaux Bernardino de Vignale pour obtenir la possession d’un enclos. En 1625, Salidonio de Scolca se voit opposé au magnifico Paolo Francesco Partenopeo qui veut voir appliquer son droit de propriété sur les terres ensemencées par Salidonio. En 1635, Bruschino d’Olmeto est en procès avec Ottaviano, fils de Salidonio de Scolca, pour la revendication de la propriété d’un enclos. 

         

        Le bétail est également l’enjeu de nombreux procès. En 1600, le gouverneur génois contraint les sculcaracci Gasano et ses frères à payer à Marco Maria et Antonsale de Vignale la somme de 8 lires pour une chèvre. En 1602, Salidonio de Scolca accuse Antongiacomo q. Giovannone de Lento de lui devoir le paiement de deux castrati (bœufs) d’une valeur de huit lires. En 1611, Giovanfrancesco q. Agostino de Scolca s’oppose devant les tribunaux à la dame Clara veuve de Giovanferrando pour la possession d’un cheptel. Enfin, on se dispute parfois la production issue de la terre : en 1611, Virgilio q. Polidoro de Vignale assigne devant la justice Arcangelo de Scolca pour la restitution de 5 staja de blé.

         

        De même, les individus se heurtent parfois aux communautés. En 1601, la communauté de Scolca est assignée par Martineto pour interdiction de passage dans son enclos situé à Campuccio. En 1623, Antognetto q. Gavino de Scolca ainsi que d’autres particuliers exigent d’être dédommagés par la communauté de Borgu pour le blé brûlé au lieu dit Poliani. La même année, les gardes-champêtres de Lucciana traînent devant les tribunaux le révérend Sansone et d’autres habitants de Scolca dans le but de les empêcher de pacager sur les territoires de Lucciana. Enfin, les communautés s’opposent également entre elles : la commune de Scolca est assignée devant les tribunaux par celle de Vulpaghjola pour la réparation d’un chemin. En 1634, la communauté de Scolca demande aux autorités génoises de reconnaître son droit de pacage sur la plaine de Borgu. En 1648, le révérend Sansone de Scolca est en procès avec les communautés de Lucciana et de Borgo pour les empêcher de faire passer un chemin sur ses terres.

         

        Des hommes et une pieve

         

        Contrairement à une idée reçue, la société corse de cette période est relativement mobile. On n’hésite pas à quitter son village d’origine pour s’installer ailleurs. Les actes du civile governatore nous permettent également d’entrevoir que les habitants de Scolca « bougent », au moins à travers la pieve et occasionnellement même au-delà. Dans les années 1610, le futur padre del commune Arcangelo de Scolca est domicilié à Lucciana, tout comme le notaire Angelo Francesco q. Casano également originaire du même village. Le notable Salidonio de Scolca est établi à Borgu. Le patronyme du notaire exerçant à Borgu de 1652 à 1681 donne son origine : il s’agit de Giuliofrancesco Scolca. Enfin, Giovanmatteo Retale de Bigorno (mais il s’agit ici probablement du nom de la pieve et non de celui du village), peut être parent de Salidonio de la Scolca, est soldat à Gênes dans la compagnie levée par le capitaine Giovanbattista Belgodere. 

         

        Les institutions locales du village

         

        A partir des années 1560, le podestà représente la communauté et défend ses intérêts collectifs de celle-ci. C’est une sorte de maire avant l’heure. On note dans les actes du civile governatore, l’élection de ce représentant pour Scolca en 1572 et 1585. En 1594 et 1595 est désigné comme podestà d’Erbaghju et de Scolca Antone q. Marco. En 1607, Orsone q. Battista, Piergiovanni q. Nielino et Arcangelo q. Martino deviennent Padri del commune de Scolca et d’Erbaghju. En 1609, c’est Martino qui est élu à la même charge pour la communauté de Scolca. Ce Martino est sans doute le fils d’Arcangelo puisqu’il porte le même prénom que le père de ce dernier. Les dynasties d’hommes politiques ne datent pas d’hier… Notons enfin qu’en 1617, les règlements édictés par la communauté de Scolca sont homologués par l’autorité génoise.

         

        On procède aussi régulièrement à l’élection des chasseurs de la communauté et à celle des gardes-champêtres. En 1585 sont ainsi élus les chasseurs des communautés de Lentu, Canavaghja, Vulpaghjola et Scolca. Ces chasseurs avaient le droit d’être armés en permanence et étaient payés par les communautés pour chasser les nuisibles et protéger les troupeaux, les semences et les récoltes des dégâts provoqués par les animaux parmi lesquels l’ours. Leur nomination était soumise à l’approbation du magistrat de la province. En 1621, 1635 et 1649 : sont désignés les gardes-champêtres de Scolca. Ils assurent l’application des règlements communautaires et défendent l’utilisation exclusive du terroir par les habitants du village au détriment des villages voisins.

         

        Les actes du civile governatore font émerger quelques personnalités dont les pratiques procédurières – par ailleurs très courantes à cette époque – les désignent comme ayant un statut social supérieur. On peut donc citer quelques membres de cette notabilité sculcaraccia de la fin du XVIe et de la première moitié du XVIIe siècles. Dans les années 1580, Ferignaccio apparaît ainsi comme un propriétaire terrien assez important. Il a pour fils Orazio. Antone q. Marco est quant à lui élu deux fois podestà du village dans les années 1590. Enfin, dans les années 1640-1650, la figure du révérend Sansone, rettore de Scolca, met en lumière un ecclésiastique qui se comporte en véritable notable, propriétaire terrien auquel appartiennent également des troupeaux. Lui non plus n’hésite pas à se lancer dans de nombreux procès contre d’autres notables ou contre des communautés pour faire valoir ses droits. Il décède en 1654. 

         

        La notabilité de Scolca s’enracine également – sans doute par des mariages – dans des villages voisins. Originaire de Scolca mais installé à Borgu, Salidonio y apparaît comme une personnalité importante. Propriétaire de bétail, il exploite également les terres appartenant à l’ancien podestà de Bastia Paolo Francesco Partenopeo, par ailleurs membre d’une grande famille de la noblesse génoise. Salidonio a au moins deux fils : Ottaviano déclaré comme fermier et Padovantone qui a épousé la fille du notaire Antonetto Ficaja. A sa mort en 1641, l’héritage de Salidonio fait l’objet de plusieurs requêtes de la part d’autres notables et de ses créanciers. Au début des années 1600, Arcangelo lui aussi sculcaracciu, est élu padre del commune de son village d’origine avant d’occuper une place politique importante à Lucciana dans les décennies suivantes.

         

        Les documents desquels ces informations sont extraites mériteraient une étude plus approfondie permettant de décrire d’autres aspects de cette société villageoise à l’époque moderne.

         

        Syvain Gregori : Vistighe di a sucetà sculcaraccia à l’età muderna ((cinquecentu è seicentu)

         

         

         

           

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